Epigénétique : les cellules souches pluripotentes induites, un modèle cellulaire prometteur pour étudier les maladies de l’empreinte parentale

L’empreinte parentale est un mécanisme épigénétique qui conduit à l’expression monoallélique d’un sous-ensemble de gènes selon leur origine parentale. Les maladies de l’empreinte parentale (Imprinting Disorders, ID), causées par des perturbations des gènes soumis à empreinte, constituent un ensemble de maladies congénitales rares qui affectent principalement la croissance, le métabolisme et le développement.

Afin de modéliser la physiopathologie des maladies de l’empreinte parentale, une équipe de recherche, composée de médecins, chercheurs, doctorants de l’Inserm, Sorbonne Université et l’IHU ICAN, a développé une nouvelle approche cellulaire. Publiée le 28 décembre 2022 dans le journal Clinical Epigenetics, cette étude s’intitule « Maintien des profils de méthylation dans les régions de contrôle de l’empreinte dans les cellules souches pluripotentes humaines induites ».

Quels sont les objectifs de cette approche ?

À ce jour, il n’existe pas de modèle fiable pour étudier la physiopathologie des maladies de l’empreinte parentale chez l’être humain, première étape au développement de stratégies thérapeutiques adaptées. Les cellules souches pluripotentes induites humaines (hiPSCs) constituent une approche cellulaire prometteuse pour modéliser les maladies humaines et les troubles génétiques complexes.

Cependant, une hyperméthylation aberrante des régions de contrôle de l’empreinte (Imprinting control regions, ICR) peut apparaître pendant le processus de reprogrammation puis la culture des hiPSCs. Par conséquent, l’équipe de recherche a testé différentes conditions de reprogrammation et de culture des hiPSCs et effectué une analyse approfondie de la méthylation au niveau des régions de contrôle de l’empreinte, dans le but de développer un modèle cellulaire permettant de comprendre les maladies de l’empreinte parentale.

Quels sont les résultats de l’étude ?

Les chercheurs ont évalué la méthylation à sept loci soumis à empreinte dans les hiPSCs avant la différenciation, à différents passages de la culture cellulaire, et pendant la différenciation chondrogénique. Comme déjà décrit dans la littérature, une hyperméthylation a été identifiée au niveau des régions soumises à empreinte 11p15 H19/IGF2:IG-DMR et 14q32 MEG3/DLK1:IG-DMR, indépendamment de la méthode de reprogrammation et des cellules d’origine.

L’hyperméthylation au niveau de ces deux loci a conduit à la perte de l’empreinte parentale, avec une expression biallélique des gènes soumis à empreinte IGF2 et DLK1, respectivement dans les régions 11p15 et 14q32. Le développement du milieu de culture epiPS™ combiné à la culture des cellules en hypoxie a permis de corriger l’hyperméthylation en H19/IGF2:IG-DMR et en MEG3/DLK1:IG-DMR et de restaurer l’empreinte parentale, tout en préservant les qualités de prolifération et de pluripotence de ces cellules souches.

Quelles sont les conclusions ?

Une analyse quantitative extensive de la méthylation des régions de contrôle de l’empreinte a retrouvé une hyperméthylation à certains ICRs (ceux méthylés sur l’allèle paternel), dans les hiPSCs associée à une perte d’empreinte dans ces régions.

Le milieu de culture epiPS™ et la culture des hiPSCs en hypoxie ont permis de rétablir une méthylation équilibrée à ces loci chez les témoins. L’équipe de recherche a également pu montrer que la méthylation était perturbée dans les hiPSC dérivées d’un patient, récapitulant donc l’anomalie moléculaire responsable de sa pathologie.

Les hiPSCs, cultivées avec ce nouveau protocole, offrent donc des perspectives très intéressantes de différenciation en cellules d’intérêt impliquées dans le phénotype des patients porteurs de maladies liées à l’empreinte parentale pour en comprendre les mécanismes physiopathologiques et envisager des cibles thérapeutiques.  

Les acteurs impliqués dans le projet

Ce projet est soutenu par : 

  • L’IHU ICAN  
  • Sorbonne Université
  • Inserm

Les acteurs et auteurs de cette étude : 

  • Pr Irène Netchine, PU-PH et Cheffe De l’équipe « Système IGF et croissance fœtale et post-natale » à Sorbonne Université/Inserm/AP-HP
  • Dr Aurélie Pham, CCU-AH, PhD à Sorbonne Université/Inserm/AP-HP
  • Céline Selenou, doctorante à l’Inserm
  • Dr Eloïse Giabicani, MCU-PH à Sorbonne Université/Inserm/AP-HP
  • Dr Vincent Fontaine, PhD à l’IHU ICAN
  • Sibylle Marteau, Assistant Ingénieur Culture Cellulaire iPS à l’IHU ICAN
  • Dr Frédéric Brioude, MCU-PH à Sorbonne Université/Inserm/AP-HP
  • Dr Laurent David, MCU-PH à Université de Nantes
  • Pr Delphine Mitanchez, PU-PH Sorbonne Université/Inserm
  • Dr Marie-Laure Sobrier, CR à l’Inserm

Lire la publication

Maintenance of methylation profile in imprinting control regions in human induced pluripotent stem cells. Pham A, Selenou C, Giabicani E, Fontaine V, Marteau S, Brioude F, David L, Mitanchez D, Sobrier ML, Netchine I. Clin Epigenetics. 2022 Dec 28;14(1):190. doi: 10.1186/s13148-022-01410-8.